Or vs Cryptos : ce qui a changé (ou pas) en 18 mois
Dans un article de janvier 2021, nous mettions en lumière les points communs, les différences et la complémentarité entre l’or et le bitcoin. Nous parlions de monnaies alternatives, de capacité à assurer la fonction de réserve de valeur, d’ancrage culturel, et de décorrélation entre les deux actifs.
Presque un an et demi plus tard, dans un monde radicalement différent tant économiquement (inflation et resserrement monétaire), que géopolitiquement (guerre en Ukraine), où en sommes-nous ?
L’or a un rapport risque/rendement 3 fois meilleur que le bitcoin
Depuis janvier 2021, l’or et le bitcoin ont eu des performances remarquables puisqu’ils se sont respectivement appréciés de 12.4% et 21.5% en euros. Cela équivaut à une performance annualisée de 8.9% pour le métal jaune, et de 15.2% pour la crypto-monnaie. C’est donc un écart significatif en faveur du bitcoin. Mais comme l’illustre le graphique, la volatilité de la cryptomonnaie (74%) est près de 5 fois supérieure à celle de l’or (15%).
Au final, la qualité d’un investissement dépend de sa capacité à transformer du risque en performance. C’est le fameux rapport risque/rendement que les professionnels appellent ratio de Sharpe. Et sur la période, il est près de 3 fois supérieur pour l’or (0.61) que pour le bitcoin (0.21).
Certes, nous aurions pu prendre une autre période, et obtenir des ratios plus favorables aux crypto-monnaies, mais cela n’aurait rien changé du côté du risque. Le bitcoin est toujours beaucoup trop volatile pour pouvoir prétendre au statut de réserve de valeur dans le temps.
Le super Nasdaq
Autre leçon, cachée précédemment par la forte envolée de la cryptomonnaie : le comportement du bitcoin sur la période s’apparente à celui du Nasdaq. La corrélation entre les actions technologique et la cryptomonnaie est à la hausse et atteint même 0.65 sur les deniers mois de correction. Avec, bien sûr, une volatilité 3 fois plus élevée pour la crypto que pour l’indice américain.
Le bitcoin se comporte donc comme un actif risqué, loin de ce que l’on attend d’une valeur refuge. La crypto est donc un piètre diversifiant de portefeuille, contrairement à l’or qui a une corrélation négative avec les indices actions mondiaux.
A la recherche d’une place dans le nouvel ordre monétaire international
Pour Ben Bernanke, l’ancien patron de la réserve fédérale américaine, le bitcoin « n’a pas réussi à être une forme alternative de monnaie ». Dans cette interview à CNBC, il pointe le manque d’utilisation concrète de la cryptomonnaie en dehors des activités illégales. Dans la vie quotidienne, l’or non plus n’a pas réussi à être une monnaie alternative, mais il remarque que le métal jaune a une valeur d’utilité sous-jacente : « vous pouvez l’utiliser pour boucher des carries ». On voit que Mr Bernanke ne va pas souvent chez le dentiste, mais l’argument reste valide, par exemple dans l’industrie numérique.
Un point de vue plus nuancé dans une interview récente, celui de Ray Dalio, le fondateur de Bridgewater, un des plus gros fonds d’investissement du monde. « Nous entrons dans une période de plusieurs années ou le monde va s’interroger sur ce qu’est une monnaie acceptable ». Une question légitime, avec les quantités de dettes émises pour surmonter la crise du Covid et les guerres commerciales en cours qui poussent les états à maintenir une valeur basse de leurs monnaies fiduciaires.
La question de la monnaie de réserve est également remise sur le devant de la scène par la guerre en Ukraine et les sanctions prises contre la banque centrale russe. Le gel des avoirs en dollars a été une surprise pour beaucoup de pays, ce qui pourraient les pousser à accélérer le placement de leurs réserves de change dans des actifs alternatifs « qui ne sont le passif de personne », comme l’or ou les cryptos.
Et toujours une complémentarité ?
La capacité des deux actifs à être un rempart contre l’inflation de court terme a également ses limites. Les deux actifs ont corrigé dernièrement, l’or surtout en raison de la crainte d’une hausse rapide des taux d’intérêt, et les cryptos principalement en raison d’un environnement défavorable pour les actifs risqués et de la débâcle de la stablecoin Terra, qui par bien des aspects s’apparentait à un schéma pyramidal.
Il devient de plus en plus clair que le bitcoin n’est pas de « l’or digital ». Et il est clair que l’or n’est pas « le bitcoin des vieux ». Il est d’ailleurs intéressant de constater que la corrélation entre les deux actifs est quasi nulle, ce qui signifie que les deux « meilleurs ennemis » peuvent cohabiter sereinement et se diversifier mutuellement. Comme le dit sagement Ray Dalio : « C’est une erreur pour quiconque de ne détenir que des monnaies digitales et pas d’or, ou de n’avoir que de l’or sans monnaie digitale. Les réponses seront trouvées en fonction des évolutions des 5 à 10 ans qui viennent »
Avertissement :
Le cours de l’or peut varier significativement à la hausse ou à la baisse. Les informations contenues dans ce document ne constituent pas une recommandation d’investissement et le lecteur est invité à prendre conseil auprès de professionnels pour la gestion de son épargne.
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