Pourquoi les banques centrales achètent-elle de l’or ?
Avec plus de 35’000 tonnes d’or détenues dans leurs coffres, les banques centrales et organisations financières internationales sont des acteurs de premier plan du marché de l’or. Mais alors que le métal jaune n’est plus utilisé officiellement comme monnaie, pourquoi les banques centrales en détiennent-elles autant ? Pourquoi certaines en achètent-elles ? Dans quelles proportions ? Pourquoi investir dans l’or ?
Une hausse régulière depuis 10 ans
Après une décennie de réduction de leur réserves d’or, les banques centrales ont changé de fusil d’épaule en 2008 avec la crise financière. Depuis, leurs avoirs de métal jaune ont progressé de près de 5800 tonnes, soit une moyenne de 415 tonnes par an. C’est ainsi environ 11% de la production minière mondiale qui finit dans les coffres de ces institutions. Et en 2021, les achats dépassent déjà 300 tonnes à fin juillet.
Le poids de l’histoire
La plupart des avoirs détenus sont un héritage du système monétaire mondial qui a prévalu jusqu’en 1971. C’est le système de l’étalon or : pour faire simple, l’or servait de garantie à la monnaie papier émise par les banques centrales, et les cours des devises étaient soit défini en poids d’or, soit en parité avec une devise elle-même convertible en or (en l’occurrence le dollar), sous certaines conditions.
Avec la fin de l’étalon or il y a 50 ans, les banques centrales n’ont pas pour autant liquidé leurs avoirs. Dans un monde de changes (plus ou moins) flottants, le métal jaune est resté un instrument de confiance pour ces institutions dont la priorité est de maintenir la stabilité monétaire. Les pays développés ont donc dans l’ensemble conservé leurs réserves.
Valeur refuge, diversification
Selon une étude récente du World Gold Council, 38% des banques centrales pensent augmenter leurs réserves de métal jaune dans les années à venir, dont 21% dans les 12 prochains mois. Sans surprise, ces dernières citent principalement l’incertitude économique liée au Covid comme principale raison de leurs futurs achats.
L’étude présente aussi les raisons plus structurelles pour lesquelles les banques centrales détiennent de l’or à plus long terme. 79% des institutions citent la performance de l’or en temps de crise, 70% sa capacité être une réserve de valeur à long terme et un bon diversifiant. Bref, pour les banques centrales comme pour l’investisseur, l’or c’est un peu une assurance de contre les risques économiques et financiers…
L’instrument d’autonomie
Parmi les autres raisons citées, 66% des banques centrales rappellent que l’or n’a pas de risque de défaut, contrairement aux autres instruments dans lesquels elles investissent leurs réserves de change (surtout les obligations). Conséquence directe : l’or n’a pas de risque de risque politique (cité par 53% des institutions), c’est une sorte d’actif neutre. C’est pourquoi pour près d’un quart des banques centrales de pays émergents, il est un instrument d’une politique de dédollarisation des réserves de change.
Et pour cause : les deux plus gros acheteurs d’or des 5 dernières années (Russie et Chine) sont des super-puissances en conflit direct avec l’oncle Sam. Et lorsque votre rival utilise le dollar comme une arme de sanctions économiques, il n’est pas illogique de se rendre moins dépendant au billet vert. C’est ce qu’a fait la Russie de Poutine ces dernières années, en liquidant toutes ses réserves en dollars, dont une partie au profit du métal jaune. Une décision que le dirigeant compte poursuivre en liquidant également les dollars du fonds souverain du pays.
L’inconnu chinoise
C’est la question qui agite les spécialistes du sujet : quelle quantité d’or détient réellement la Chine, 1er pays producteur d’or et prétendante au fauteuil de première puissance mondiale ? Ses réserves déclarées au FMI sont de 1948 tonnes, mais beaucoup pensent que le pays accumule discrètement le métal jaune.
En 2009 et 2015, le pays avait annoncé des augmentations massives de ses avoirs, résultant d’accumulation continue et discrète les années précédentes. Plusieurs indices soutiennent cette hypothèse : un secteur minier contrôlé par l’état, des restrictions à l’exportation, et une volonté d’assoir le yuan comme monnaie internationale. Autant dire qu’un jour les réserves d’or chinoises pourraient surprendre…
Outil de souveraineté
Outre ces deux superpuissances, il est intéressant de retrouver au palmarès des acheteurs la Turquie d’Erdogan, ou la Hongrie d’Orban. Au 13ème rang, le Brésil de Bolsonaro, et en bonne place, les républiques du Caucase. Leur point commun ? Une volonté d’affirmation de leur souveraineté. Acheter de l’or, c’est un moyen de dire qu’on est une nation qui compte.
Et de le dire d’abord à sa propre population, qui adhère facilement à l’or valeur refuge et instrument de confiance dans l’économie nationale. C’est un moyen d’accroitre la confiance dans la monnaie du pays, puisque sa banque centrale détient des actifs tangibles, palpables et précieux.
Augmenter ses réserves d’or, c’est aussi adresser un message à la communauté internationale. La Pologne, lorsqu’elle a acheté 100 tonnes d’or à l’été 2019, a souligné l’importance de devenir le « 1er pays détenteur d’Europe de l’Est ». Acheter de l’or, c’est sans nul doute un moyen de faire briller son pays. A tous les niveaux.
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