Baisse de la monnaie chinoise, une mesure pour contrer la hausse des taxes ?
Ces derniers jours, la monnaie chinoise a atteint ses niveaux les plus bas depuis 1 an, et ce tant vis-à-vis du dollar que de l’euro. De là à penser que la Banque Centrale de Chine (PBOC) intervient afin de contrer la hausse des taxes imposée par l’administration Trump, il n’y a qu’un pas aisé à franchir. Le président américain vient d’annoncer qu’il envisageait de passer de 10 % à 25 % de taxe supplémentaire sur 200 milliards de dollars d’importations chinoises. Jusqu’où peut aller la baisse artificielle du Yuan face aux autres monnaies et quels sont les risques pour l’économie mondiale ?
Le fonctionnement de la valeur du Yuan
Contrairement à des devises comme le dollar ou l’euro, le cours de la monnaie chinoise ne fluctue pas librement en fonction de l’orientation des marchés. Si elle n’est pas non plus figée, elle ne peut toutefois pas s’écarter en principe d’un cours pivot de + ou — 2 %. Cette variation est officiellement décidée au jour le jour en fonction du cours des monnaies d’un panier de devises composé par le dollar, l’euro et le yen japonais. Ce mode de fonctionnement est du moins celui officiel, l’histoire ayant démontré que la réalité étant assez différente. La Chine peut en effet aisément dépasser les limites du cours pivot, et d’ailleurs ne s’en prive pas.
Un cours pivot très théorique
Lors des 3 derniers mois, le cours du change du dollar est passé de 6.28 à 6,83 yuans, soit une hausse de 8 %. Le schéma étant identique pour l’euro et le yen, les limites du cours pivot ont été largement dépassées sans réelles explications du côté chinois. Ce qui est certain est que la dépréciation de la monnaie chinoise limite fortement l’effet de la première vague de hausse des taxes d’importations. C’est d’ailleurs ce qui pourrait expliquer l’annonce d’une mesure plus lourde avec une hausse de 25 % des taxes sur les produits chinois.
La banque centrale chinoise pourra-t-elle absorber une nouvelle hausse des taxes ?
En jouant sur sa monnaie, les autorités chinoises ont démontré à l’administration américaine qu’elles avaient la possibilité de gommer les effets de la hausse des taxes. Au cas où le début de l’automne s’accompagnerait de la mise en œuvre d’une augmentation des droits de douane, la banque centrale se risquera-t-elle à cette opération coûteuse tant financièrement que politiquement ? Les exportations étant fortement subventionnées par l’État, cette solution est d’autant plus envisageable qu’elle a été utilisée à plusieurs reprises. Pour s’en persuader, il suffit de souvenir qu’il y a 10 ans 1 euro valait 10 yuans contre 6,5 cinq ans plus tard. Si un yuan faible favorise les exportations chinoises, il défavorise par contre les importations de produits étrangers. Sur ce dernier point, il s’agit d’une arme à double tranchant puisque rend plus concurrentiels les produits chinois sur le marché local, mais rend certaines matières premières importées plus chères. Ce dernier risque peut toutefois se voir limité par les contrats d’importations libellés en Yuan et adossés à l’or et qui portent justement sur des matières premières comme le pétrole et certains minerais. S’il est donc possible de voir la Chine dévaluer sa monnaie pour contrecarrer les décisions de hausse des droits de douane, les subventions ont un coût très élevé. Pour financer ces aides plus ou moins déguisées, les autorités chinoises puisent en effet dans leurs réserves de change, un yuan revu à la baisse augmentant sensiblement l’addition. Les mois à venir vont donc être déterminants dans le bras de fer qui oppose la Chine aux États-Unis. Qui en sortira gagnant ? Difficile à dire, mais un des perdants sera sans trop de doute le consommateur, qu’il soit américain, européen ou chinois.
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