BREXIT : Les conséquences sur le cours de l’Or. L’avis de Laurent Schwartz (Président du Comptoir National de l’Or)
L’augmentation du cours de l’Or pendant la nuit suivant le vote britannique est à la hauteur de la surprise générale. L’Or s’est élevé à 1358,2$ l’once vers 4 heures du matin, soit 8,2% d’augmentation. Dans le même temps, l’euro s’est déprécié de près de 5% tombant à un plus bas de 4 mois face à la monnaie américaine, propulsant le cours de l’Or en euro à des sommets de 3 ans !
Si l’or joue parfaitement son rôle, faut–il pour autant se précipiter pour investir ?
Warren Buffet disait en pleine crise des Subprime au Journal Le New York Times que la règle à suivre pour investir est de « fuir lorsque les gens sont avides, et d’être avide lorsque les gens paniquent ». Le traffic du site Gold.fr a triplé ce vendredi avec en parallèle une augmentation significative de la fréquentation dans les agences du Comptoir National de l’Or partout en France. Les questions sont toujours les mêmes : « est-il encore temps d’investir ? ». Le cours de l’or termine son « Brexit Gold Rallye » à +7% ce vendredi 24 juin. Il faut maintenant analyser sereinement les facteurs d’instabilité à venir pour mesurer le potentiel à venir du cours de l’Or.
En effet, les incertitudes qui pèsent sont nombreuses. A commencer par la santé économique de la Grande Bretagne dont le PIB pourrait être amputé de 5% selon les experts de l’OCDE début juin. La France pourrait voir son PIB être amputé de 0,2 à 0,4% étant 5e client et 5 fournisseur du Royaume Uni. La démission du Premier Ministre Britannique David Cameron (au profit des populistes ?) n’est pas plus réjouissante, et les velléités d’indépendance de l’Ecosse pourraient se préciser. L’élection de Donald Trump pourrait être le second acte d’un repli généralisé des Nations sur elles-mêmes.
Et dans ce contexte, il est bien peu probable de voir une augmentation des taux de la Fed ce qui aura pour conséquence de soutenir le métal jaune. Si la principale victime à très court terme du Brexit semble être la livre sterling, l’euro n’est pas en reste et les tensions risquent de se cristaliser à mesure que les eurosceptiques avanceront leurs pions et rendront le scénario d’un éclatement de la zone euro de plus en plus probable.
Par ailleurs, les difficultés de la Grèce n’ont pas disparu, et les pays du sud de l’Euroland, au rang desquels la France, n’en ont toujours pas fini avec le laxisme budgétaire. On semble donc entrer dans une période d’instabilité monétaire dans laquelle l’euro pourrait être attaqué de toutes parts.
Quelle sortie pour le Royaume Uni et quel impact pour l’or ?
Si le Royaume Uni transforme cette difficulté de court terme en un succès à long terme, ce sera la victoire des populistes européens qui verront dans le Brexit le modèle à suivre pour leur pays, et donc le délitement lent de l’Union Européenne. C’est justement ce que prédit Nigel Farage, leader du parti indépendantiste Britannique. Et si le Royaume Uni tombe en récession comme le prédisent certains, et compte tenu du poids de son économie dans l’économie mondiale (le Royaume Uni est, rappelons le, la cinquième économie mondiale et la deuxième économie européenne), il y a fort à parier que cela pèsera lourd sur la croissance européenne et repoussera toute chance de voir repartir cette dernière à court ou moyen terme.
Ces événements ont au moins pour mérite de confirmer clairement le rôle de l’or comme valeur refuge, toutes classes d’actifs confondues. L’or termine le second semestre 2016 avec une performance inégalable de plus de 20%, quand le CAC perd plus de 10%, et quand l’immobilier (France) et le Dow Jones sont atones. Pire, les liquidités des banques sont placées à des taux négatifs. Le “rendement à 0%” de l’Or apparaît, dans ce contexte, comme un avantage.
Rappelons pour finir que le kg d’or avait dépassé les 44 000 € en 2012,. Rien ne permet de penser que les menaces sur l’économie en général, et sur l’euro en particulier, soit moins sérieuse aujourd’hui qu’il y a 4 ans.
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